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Directive européenne sur la transparence des rémunérations

Pourquoi ce texte change la donne ?

Adoptée en mai 2023, la directive européenne 2023/970 impose aux États membres de garantir une transparence sans précédent sur les rémunérations.

Elle consacre au niveau européen le droit à l’égalité de rémunération entre femmes et hommes pour un même travail ou un travail de valeur égale, déjà affirmé en France à l’article L3221-2 du Code du travail.

En France, malgré la mise en œuvre de l’Index EGAPRO, les écarts de salaires persistent.

Avec une échéance de transposition fixée au 7 juin 2026, cette directive constitue un tournant majeur pour toutes les entreprises publiques comme privées.

Qu'est-ce qui change par rapport à Egapro ?

  • Un périmètre élargi car la directive couvre tous les travailleurs ayant un contrat de travail ou une relation de travail, incluant les travailleurs à temps partiel, à durée déterminée, les intérimaires, les travailleurs en emploi protégé, les stagiaires rémunérés et les apprentis…

 

  • Une notion de “rémunération” élargie, englobant non seulement le salaire, les traitements mais aussi tous les avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature (primes, bonus, avantages en nature, etc.) par l’employeur au travailleur en raison de l’emploi de ce dernier. Les composantes complémentaires ou variables peuvent comprendre, sans s’y limiter, les primes, la compensation des heures supplémentaires, l’indemnisation des déplacements, les indemnités de logement et de repas, l’indemnisation de la participation à des formations, les indemnités en cas de licenciement, les indemnités légales de maladie, les indemnités légales obligatoires et les pensions professionnelles… Cela vise à éviter que des écarts se cachent dans les composantes variables ou périphériques du salaire.

 

  • 7 indicateurs détaillés sur les écarts de rémunération au lieu d’un indicateur:
    • chacun étant calculé en faisant la différence entre les niveaux de rémunération concernés des travailleurs féminins et des travailleurs masculins d’un employeur, exprimée en pourcentage du niveau de rémunération concerné des travailleurs masculins

L’écart de rémunération entre les femmes et les hommes 

L’écart de rémunération médian entre les femmes et les hommes.

L’écart de rémunération entre les femmes et les hommes au niveau des composantes variables ou complémentaires.

L’écart de rémunération médian entre les femmes et les hommes au niveau des composantes variables ou complémentaires.

La proportion de travailleurs féminins et de travailleurs masculins bénéficiant de composantes variables ou complémentaires.

La proportion de travailleurs féminins et de travailleurs masculins dans chaque quartile.

L’écart de rémunération entre les femmes et les hommes par catégories de travailleurs, ventilé par salaire ou traitement ordinaire de base et par composantes variables ou complémentaires.

Un seuil d’alerte fixé à 5 %, sans aucune marge de tolérance.

    • Contrairement à l’Index Egapro, où une marge de 2 à 5 % était intégrée selon les catégories socio-professionnelles dans le calcul, ce seuil s’appliquera directement : ainsi, certaines entreprises pourraient être mises en alerte malgré leur note Egapro (écart rémunération H/F inférieur à 5%).
    • Tout écart supérieur à 5 %, non justifié par des critères objectifs (parcours éducatif, expérience professionnelle, formation, compétences, efforts, responsabilités, conditions de travail…), obligera l’employeur à engager des mesures correctives, notamment via une évaluation conjointe avec les représentants du personnel.
    • L’objectif est une obligation de résultat : non seulement mesurer mais corriger les déséquilibres de rémunération injustifiés.

 

La fréquence de ce reporting dépend de la taille l’entreprise : tous les ans pour les entreprises de taille supérieure ou égale à 250 employés et tous les 3 ans pour celles inférieures à 250 employés.

Dans l’attente de sa transposition en France d’ici juin 2026, la directive ouvre plusieurs pistes concernant l’évolution de l’Index Egapro : mise à jour des indicateurs, automatisation du calcul prise en charge par les pouvoirs publics et ajustement des règles pour limiter les exclusions…
Restent à définir le champ d’application (entreprises de moins de 100 salariés), le régime de sanctions (actuellement plafonné à 1 % de la masse salariale) et la possible introduction de l’« éga-conditionnalité » pour l’accès aux marchés publics.

Quelles sont les obligations clés pour votre entreprise ?

La directive introduit une série d’exigences nouvelles, qui impacteront profondément vos pratiques RH et managériales :
  • Recrutement transparent : interdiction de demander le salaire antérieur des candidats et obligation d’afficher une fourchette de rémunération claire dans chaque offre d’emploi.
  • Fin des tabous salariaux : suppression des clauses de confidentialité empêchant les salariés de partager leurs rémunérations.
  • Droit à l’information : tout salarié pourra demander à connaître sa rémunération ainsi que la moyenne par sexe pour les autres employés effectuant le même travail ou un travail de valeur égale. Ce droit, inexistant jusqu’alors en droit français, permettra aux salariés de situer leur salaire par rapport à leurs pairs et de détecter d’éventuelles inégalités.
  • Charge de la preuve inversée : en cas de litige, c’est à l’employeur de démontrer l’absence de discrimination salariale.
  • Publication des écarts de rémunération et reporting obligatoire : les entreprises de plus de 100 salariés devront publier régulièrement leurs écarts de rémunération, données qui devront être communiquées aux salariés et à l’autorité administrative compétente.

Quel calendrier ?

1er rapport publié en juin 2027 sur données

2026 pour les entreprises de plus de 150 employés

Quelles opportunités et quels risques?

Si la directive peut sembler contraignante, elle représente aussi une opportunité stratégique. Les organisations pionnières qui adoptent la transparence en sortent renforcées : attractivité accrue auprès des talents, climat social plus apaisé, fidélisation des collaborateurs, meilleure image auprès des investisseurs et clients sensibles aux enjeux RSE.

À l’inverse, l’inaction expose à des risques élevés : sanctions financières, litiges juridiques, tensions internes si des écarts inexpliqués sont révélés brutalement. Pour les entreprises, le vrai danger n’est pas la directive en elle-même, mais d’y arriver en retard, sans préparation ni plan d’action.

Comment se préparer dès maintenant ?

Il serait illusoire d’attendre le dernier moment au vu de l’ampleur du changement évoqué, ci-dessous quelques étapes clés pour les entreprises dans cette préparation :

  • Réaliser un statut sur la rémunération : identifier tous les types de rémunérations perçus par les travailleurs de l’entreprise
  • Mettre à jour les classifications et référentiels de compétences : clarifier les critères concrets et mesurables permettant de justifier des écarts
  • Construire des grilles salariales transparentes : définir des fourchettes claires par poste, accessibles à tous.
  • Réaliser un double  audit interne des rémunérations (périmètres : Egapro et directive) : identifier les risques et préparer les plans d’actions
  • Adapter vos processus de recrutement et de promotion : notamment bannir les pratiques qui perpétuent les inégalités en formalisant un cadre avec des critères objectifs, mettre à jour les clauses des contrats de travail…
  • Former managers et RH : les préparer à expliquer les décisions salariales de manière factuelle et équitable.
  • Impliquer et fédérer l’ensemble des parties prenantes, tout en communiquant avec clarté et constance, afin d’accompagner et d’ancrer le changement

 

La directive sur la transparence des rémunérations n’est pas une simple obligation administrative : c’est un changement de culture. Elle impose d’ancrer la transparence et l’égalité professionnelle au cœur de la gouvernance et des pratiques RH.